Orientation scolaire et professionnelle ?
Thérèse Delhaye
Ponctuations sans mots, émotions qui ne s’articulent plus dans les phrases. Les histoires s’entremêlent se contredisent,´Oh pardon, je ne suis pas claire, je suis confuse n’est-ce pas ? les mots racontent à eux-seuls bien plus que les mots, la personne s’abandonne.
Le regard perdu comme une longue interrogation qui s’exprime en toile de fond. Un questionnement douloureux qui sous-tend chaque mot, chaque respiration, et qui ne sort pas …de peur de recevoir la réponse tant redoutée.
Même si la peur transpire d’elle-même, elle ne se livre qu’à la fin du récit. “D’abord tout déballer, je me lache, je raconte, tant pis pour les conséquences, tant pis pour le diagnostic, il faut que je sache, cela fait trop mal. Berceau de mes cauchemars de petite fille.”
“Je sais, ça n’a pas de sens, vous allez me prendre pour une folle. Cela n’a ni queue ni tête. Ça part dans tous les sens. Oh mon dieu…Excusez-moi, c’est vraiment n’importe quoi !”
“Heeee , Madame, vos sanglots, vos dernières compagnes, vous entourent comme une écharpe amie, et douloureuse. Votre humanité, s’étire au travers de ces phrases entremêlées, qui défient tout grammaire.” Le lexique y perd son latin de ces mots naissant au carrefour d’idées qui s’entrechoquent, de récits qui se croisent, et se tamponnent.
Des mots nouveaux en disent bien plus que les autres, petits lambeaux d’âme.
Et vous me soumettez la question, si ce n’est parfois moi qui me permet de vous la tendre comme un Kleenex, élégamment afin que vous n’ayez à la formuler, trop douloureuse : “Dites docteur, est-ce que je ne suis pas folle ?”
C’est comme l’apogée d’un concerto, dont vous êtes le triste soliste, dont les notes s’égrènent dans un crescendo de rythmes et d’émotions, arrivent à un fortissimo, et vous laisse sans voix.
Suis-je folle ?
Mais bien sûr que vous êtes normale, vous venez de me montrer votre humanité faite de tous vos débordements, de vos failles, de vos contradictions, et de vos questions sans réponses.
Vous vous êtes laissée emportée par ce tsunami, cette déferlante d’émotions retenues.
Vous vous livrez, par confiance, mais surtout par défaut , car le barrage cède, de douleur, de fatigue et vous laisse vous échapper dans ce torrent qui déverse des bouts de vous-même , dans lesquels vous vous reconnaissez tellement.
Etes-vous folle ? Voulez-vous que je vous parle franchement du fond de mon cœur, du fond de ce que je crois ? Je vous rassure, vous êtes bien folle.
Non, pas folle à être psychiatrisée, folle de vous rencontrer enfin, d’oser cette rencontre, de passer de l’autre côté du miroir, et d’en ressentir toute l’émotion.
Folle de vivre votre propre chaos, de le reconnaitre, et assez forte pour pouvoir le raconter peut-être une 1ere fois aujourd’hui, aussi forte.
Vous êtes là,Madame, belle et puissante de votre vulnérabilité. Nous y sommes dans ce monde où le sensible est aussi votre ligne de force, où la vulnérabilité vous protège de votre dureté, et où tous vos contraires ont place et dansent en vous-même à vous donner le tournis.
Vous êtes folle de vivre, et c’est une excellente nouvelle !
Je sais à quel point mes propos peuvent vous paraître choquants, tant vous videz ma boîte de Kleenex.
Tant j’assiste à l’effondrement des dernières barrières sous cette puissante vague de désolation, et de désespoir.
Mais je ne peux vous cacher cette vérité, qui est de vous rassurer à quel point vous êtes normale d’être folle.
Je ferai de mon mieux, pour cautionner votre folie, vous encourager à vous perdre pour mieux vous trouver, en toute sécurité, en toute bienveillance avec vous-même.
Enfin, chère Madame, je vous remercie de m’avoir fait entrer dans vos fêlures dont la beauté ne vous apparaîtra qu’au fil de la tendresse que vous vous tisserez.
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Thérèse Delhaye
Thérèse Delhaye
Pierre Duray
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